BARTÓK

 

Pour introduire les six Quatuors de Bartók, une des clés de voûte du Festival de Quatuors à cordes du Luberon, Danielle Doucet a réalisé six tableaux dont les sons, les rythmes et les couleurs vont se répondre magnifiquement. En effet, dans un puissant raccourci, en évoquant la force suggestive de la musique du maître, cette série va raconter les circonstances de la création de ces quatuors, de déceptions en renaissances vécues.

 

Il faut s’attarder plus longuement sur la mise en scène que constituent les différents tableaux pour saisir le rôle essentiel que jouent les variations d’intensité des gris, des noirs, les projections brossées et colorées, pour demeurer en résonance avec les partitions elles-mêmes. La sonorité de la dominante rouge s’oppose là à l’alto de parties plus sombres constituant le dialogue voire l’opposition des mouvements et des thèmes de la partition.  

 

La violence expressionniste des pinceaux et des brosses de Danielle Doucet constitue un cri de douleur. Son écriture en dit long sur l’estime dans laquelle elle tient l’œuvre de Bartók. Ici, l’usage d’un carré d’or suggère le rapport qui structure les compositions de ce dernier. Certaines parties des tableaux vont se répondre symétriquement autour d’un mouvement central rappelant la forme thématique musicale A B C B A (la forme en arche) des quatuors qui parcourt l’ensemble de l'échelle tonale.  

 

Finalement, en laissant ses pinceaux acquérir leur propre expressivité, Danielle Doucet a tenté, avec six tableaux, de faire le pari d’évoquer le paradoxe d’un compositeur de génie peu communiquant mais capable de révéler dans toute sa nudité, l’humanité complexe des peuples d’Europe Centrale. Pari gagné : confirmant que, au-delà de la diversité culturelle, l’amour soumis à l’épreuve purificatrice de la douleur occupe toujours une place essentielle dans la création.  

 

 

 

Alain Maldonado